Maîtriser le vocabulaire littéraire est utile au correcteur

D’où vient le mot « théâtre » ? Qu’est-ce qu’un « essai » ? Quelle est la dif­fé­rence entre le genre et le registre ? Com­ment a évo­lué le sens du mot « poé­sie » ? De quand date le mot « lit­té­ra­ture » ? À quand remonte la forme épis­to­laire ? Les lettres ont-elles tou­jours été sépa­rées des sciences ? C’est à des ques­tions de ce genre que répond ce petit livre, très instructif.

On y apprend, notam­ment, que ce n’est qu’au xixe siècle que l’orthographe est deve­nue un cri­tère d’embauche des fonc­tion­naires1 et que la gram­maire a ces­sé d’être « un code qui s’impose à tous » pour deve­nir « une matière dont on peut jouer » pour « être recon­nu comme un grand écri­vain ». Ces consi­dé­ra­tions ne peuvent qu’intéresser le correcteur.

Paul Aron et Alain Via­la, Les 100 mots du lit­té­raire, « Que sais-je ? », PUF, 2008 ; 2e éd. mise à jour, 2011.

NB — Ce « Que sais-je ? » syn­thé­tise Le Dic­tion­naire du lit­té­raire (PUF, 2010, 848 pages), diri­gé par les mêmes auteurs, aux­quels s’était adjoint Denis Saint-Jacques.


  1. « L’or­tho­graphe est deve­nue le cri­té­rium de la belle édu­ca­tion », constate Paul Valé­ry en 1936 (dans Varié­té III, p. 281). ↩︎

Qu’est-ce qu’être “emblématique” aujourd’hui ?

Ernes­to « Che » Gue­va­ra « reste une figure emblé­ma­tique » (Togo diplo­ma­tie).

L’u­sage de l’ad­jec­tif emblé­ma­tique a explo­sé depuis les années 1990 (voir les gra­phiques four­nis par l’article de La Langue fran­çaise).

Ce mot appa­raît en fran­çais en 1564, au sens de « com­po­sé de pièces rap­por­tées », dans le Cin­quième livre (chap. 39) de Rabelais.

Fon­da­men­ta­le­ment est emblé­ma­tique ce qui contient un emblème ou ce qui en a le carac­tère (Lit­tré ou le Dic­tion­naire de l’A­ca­dé­mie).

Ain­si, des tableaux emblé­ma­tiques avec devises (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 4, 1859) [peints dans le grand salon d’un châ­teau] contiennent des emblèmes, alors que seize est le nombre emblé­ma­tique de la volup­té (Gau­tier, Le Roman de la momie, 1858) : il la sym­bo­lise (exemples du TLF). De même, la colombe est la figure emblé­ma­tique (ou l’emblème) de la paix.

Une œuvre d’art peut donc être emblé­ma­tique soit parce qu’elle contient un emblème (cet emploi est rare aujourd’­hui), soit parce qu’elle est repré­sen­ta­tive d’autre chose : la BnF parle, par exemple, d’« un des­sin emblé­ma­tique du fonds » (il est extrait d’un ensemble de des­sins réa­li­sés entre 1943 et 1944 par les enfants de la colo­nie d’Izieu).

L’emploi d’emblé­ma­tique au sens pre­mier de « qui a valeur d’emblème » n’a pas tota­le­ment disparu :

Don­ner à la dis­pa­ri­tion de quelques espèces par­ti­cu­lières un carac­tère emblé­ma­tique est sans doute béné­fique, car nous avons besoin de sym­boles (Res­pon­sa­bi­li­té et envi­ron­ne­ment, 2009, Patrick De Wever, Cairn.info, cité par le Dico en ligne — je souligne).

Plus sou­vent est dit emblé­ma­tique, aujourd’­hui, ce « qui repré­sente (qqch., une idée) de manière forte » (Le Grand Robert).

André Bre­ton est la figure emblé­ma­tique du sur­réa­lisme (Wik­tion­naire) : il repré­sente ce mou­ve­ment artis­tique à lui seul ; l’œuvre de Rabe­lais est emblé­ma­tique de son temps parce qu’elle « ouvre sur la réflexion huma­niste et le besoin d’un renou­veau » (Maxi­cours).

On peut encore écrire que Gil­bert Dou­cet est une figure emblé­ma­tique du rug­by tou­lon­nais (La Langue fran­çaise, art. cité), parce que, « pos­sé­dant les carac­tères propres à une caté­go­rie d’êtres ou de choses, [il] peut être choi­si pour l’incarner, la reflé­ter » (repré­sen­ta­tif, Aca­dé­mie). Mais si l’on dit qu’Un­tel est une figure emblé­ma­tique du sport (Le Grand Robert), Untel repré­sente-t-il le sport à lui seul ? C’est plus discutable.

Emblématique, mais de quoi ?

C’est sur­tout quand le mot emblé­ma­tique est employé sans com­plé­ment que son sens nou­veau se révèle : la per­sonne ain­si qua­li­fiée n’est plus vrai­ment repré­sen­ta­tive de quoi que ce soit (du moins, l’é­non­cé ne le pré­cise pas), elle est seule­ment une figure mar­quante. Quelques exemples (tirés de Cor­dial et du Dico en ligne) :

Menés par leur emblé­ma­tique capi­taine, Fran­çois (Le Monde, juillet 1995).

Qui, hor­mis l’emblématique pré­sident, pour­ra dire la des­ti­na­tion des mal­ver­sa­tions ? (Le Monde, 1999).

À 63 ans, ce per­son­nage emblé­ma­tique va devoir rac­cro­cher les bottes sans savoir s’il va être rem­pla­cé (Ouest-France, mai 2019).

Les héros – gloire natio­nale, per­son­nage emblé­ma­tique, homme pro­vi­den­tiel ou femme fatale – font naître des dési­rs, pro­voquent des besoins et conduisent au trans­fert de per­son­na­li­té (Esprit, 2021, Cairn.info).

On en trouve la confir­ma­tion dans la liste de syno­nymes d’emblé­ma­tique que pro­pose, dans cette accep­tion, le logi­ciel Anti­dote : « mythique, mar­quant, incon­tour­nable, légen­daire, culte, célèbre, connu, his­to­rique, illustre, mémo­rable, inou­bliable, renom­mé, répu­té, immor­tel, notoire, popu­laire, glo­rieux, recon­nu, pro­ver­bial, de grand renom ».

Il ne faut donc pas confondre un « cli­ché “emblé­ma­tique” du Covid-19 » (Ouest-France, avril 2021) — pho­to­gra­phie dont la force expres­sive résume la pan­dé­mie — avec les « cli­chés emblé­ma­tiques » ven­dus à l’en­can par Chris­tie’s (« Série limi­tée », Les Échos, juin 2021). Ces der­niers sont plu­tôt remarquables.

Le terme s’est bana­li­sé au point qu’un sac en tis­su (ou tote bag) peut être qua­li­fié d’« objet emblé­ma­tique » (Capi­tal, décembre 2019, cité par le Dico en ligne) — ou ico­nique. Reste à savoir de quoi…

“Problématique” et autres mots longs à la mode

Wal­ter Ben­ja­min… étu­diant une pro­blé­ma­tique ? DR.

D’après Alain Rey, « […] sous l’influence de l’allemand Pro­ble­ma­tik et dans un usage didac­tique, la pro­blé­ma­tique (1929, dans la Revue d’Allemagne) désigne la tech­nique qui consiste à bien poser un pro­blème ou un ensemble cohé­rent de pro­blèmes et, par méto­ny­mie, l’ensemble des pro­blèmes rela­tifs à un sujet don­né » (Dic­tion­naire his­to­rique de la langue fran­çaise).

Dit autre­ment, « la pro­blé­ma­tique est l’art de consi­dé­rer un pro­blème. C’est l’ensemble des ques­tions à poser pour com­prendre et résoudre un pro­blème ou une situa­tion. C’est la façon dont on aborde un sujet » (Tra­vaux de plume).

C’est par­fois pour sous-entendre « un ensemble de pro­blèmes » que les locu­teurs semblent employer pro­blé­ma­tique, par exemple dans « la pro­blé­ma­tique de l’environnement ». Mais pas tou­jours (voir aus­si La Vitrine lin­guis­tique).

Plus lar­ge­ment, on constate une ten­dance à choi­sir un mot plus long pour expri­mer une notion de base. 

Dès novembre 2010, l’excellent site Par­ler fran­çais s’exclamait :

« De grâce, […] évi­tons d’en faire ce détes­table fourre-tout que cer­tains croient utile d’employer à la place de pro­blème, d’enjeu ou de ques­tion à pro­pos de tout sujet de la vie cou­rante néces­si­tant un tant soit peu de réflexion. Pour se don­ner des airs impor­tants ? » (C’est aus­si l’a­vis de l’Aca­dé­mie.)

Ajou­tant en remarque :

« On ne peut que déplo­rer la ten­dance actuelle à rem­pla­cer abu­si­ve­ment un mot simple par un pseu­do-syno­nyme plus long donc plus sérieux : pro­blé­ma­tique au lieu de pro­blème, thé­ma­tique au lieu de thème [voir Aca­dé­mie], tech­no­lo­gie au lieu de tech­nique, métho­do­lo­gie au lieu de méthode, etc. Des­cartes aurait-il eu l’air plus péné­tré en rédi­geant un Dis­cours de la métho­do­lo­gie ?… »

J’y ajou­te­rai typo­lo­gie au lieu de type, dicho­to­mie au lieu de sépa­ra­tion, para­digme au lieu de modèle, etc.

Je n’ai pas trou­vé d’article retra­çant l’origine de cette mode.

Découverte d’un mot rare : “épuçage”

Un singe épuce un autre singe. © Nicho­las San­ta­sier, Pexels.

Déjà rare au sens propre (action d’épucer, « ôter les puces », comme se le font les chiens ou le font entre eux les singes), le nom épu­çage l’est encore plus au sens figuré : 

« L’épuçage des coquilles dans une épreuve typo­gra­phique incombe au cor­rec­teur d’imprimerie et à l’auteur. — L’épuçage de ce texte a révé­lé maintes fautes d’orthographe et de ponc­tua­tion. — Chaque texte est lu huit fois, d’abord par son auteur, puis par le rédac­teur en chef, sou­vent par la direc­tion, enfin par cinq cor­rec­teurs qui ne sont pas là pour recher­cher les coquilles typo­gra­phiques, cet épu­çage étant opé­ré par une autre équipe (Pierre Des­cargues, “Scan­dale chez Larousse”, dans la Tri­bune de Lau­sanne, 3 octobre 1959). » — Jean Hum­bert (1901-1980), Le Fran­çais en éven­tail, Bienne (Suisse), éd. du Pano­ra­ma, 1961, p. 105-106.

« Épu­çage des coquilles » est une asso­cia­tion assez curieuse.

Le TLF confirme l’usage du verbe :

« Au fig., rare. Exa­mi­ner avec un soin minu­tieux pour cher­cher des erreurs, des fautes. Épu­cer un texte. Synon. épouiller. Un autre a épu­cé Vil­lon, s’est effor­cé de démon­trer que la grosse Mar­got de la bal­lade n’é­tait pas une femme mais bien l’en­seigne d’un caba­ret (Huys­mans, Là-bas, t. 1, 1891, p. 33). »

Et remarque : 

« On ren­contre ds la docum. épu­çage, sub­st. masc. Action d’é­pu­cer. Au fig. Et puis sup­pri­mez des blancs et des petits points. Cela trop sou­ligne [sic] le décou­su de l’œuvre [le Roman d’un Spa­hi] qui reste, mal­gré cet épu­çage de votre ami, une œuvre (A. Dau­det ds Loti, Jour­nal intime, 1878-81, p. 206). »

Vic­tor Hugo a employé, lui, épouiller : 

« Exa­mi­ner (quelque chose) avec un soin méti­cu­leux pour sup­pri­mer des erreurs. Épouiller un texte. Les cor­rec­teurs ont deux mala­dies, les majus­cules et les vir­gules, deux détails qui défi­gurent ou coupent le vers. Je les épouille le plus que je peux (Hugo, Cor­resp., 1859, p. 298). » — TLF.

Sur la polysémie du mot “correcteur”

Der­niè­re­ment, j’ai reçu de Lin­ke­dIn des offres d’emploi de « correcteur/rice - mon­teur en ins­tal­la­tions sani­taires » et de « chef correcteur/rice bou­lan­ger ». Éton­nant, non ? Cela m’a don­né l’idée de reve­nir à la poly­sé­mie du mot cor­rec­teur.

Dès le début de mes recherches, il y a trois ans, j’ai été confron­té au manque de per­ti­nence des résul­tats ren­voyés par Google, dû au fait que cor­rec­teur et cor­rec­trice sont à la fois des noms et des adjec­tifs. Ain­si, tout ce qui cor­rige est cor­rec­teur (cor­rec­tif est plus rare). Verres, appa­reils, dis­po­si­tifs divers (cor­rec­teur de tona­li­té, cor­rec­teur gazo­mé­trique, cor­rec­teur de pos­ture, etc.) ou actions. Lan­cer le mot-clé cor­rec­teur ren­voie donc des résul­tats liés à l’optique, à la chi­rur­gie, à l’orthodontie, à la cos­mé­tique, à la gym­nas­tique, etc.

Il m’a fal­lu aus­si éli­mi­ner des résul­tats les cor­rec­teurs d’examens (ou de copies, nou­velle poly­sé­mie, la copie étant, dans l’é­di­tion et l’im­pri­me­rie, le texte des­ti­né à être sai­si et trai­té en com­po­si­tion), ou exa­mi­na­teurs, « chargé[s] de cor­ri­ger et de noter les devoirs rele­vant de [leur] spé­cia­li­té » (TLF), tels les deux exemples avec les­quels j’ai commencé.

Correcteur Tipp-Ex
Cor­rec­teur Tipp-Ex.

Il m’a fal­lu éli­mi­ner encore les pro­duits blancs per­met­tant d’ef­fa­cer les fautes de frappe (pho­to ci-contre) et, sur­tout, les cor­rec­teurs ortho­gra­phiques, logi­ciels ins­tal­lés dans nos ordi­na­teurs et nos télé­phones por­tables, et qui nous valent bien des mésaventures. 

Mais, au fil de mes recherches, j’ai décou­vert d’autres cor­rec­teurs plus inat­ten­dus, dans l’histoire.

Ain­si, le cor­rec­teur dési­gnait autre­fois, dans les col­lèges, un employé char­gé de fouet­ter les éco­liers : 

"Dictionnaire du fouet et de la fessée", PUF, 2022
Isa­belle Pou­trin, Éli­sa­beth Lus­set (dir.), Dic­tion­naire du fouet et de la fes­sée. Cor­ri­ger et punir, PUF, 2022.

« De mon temps, le cor­rec­teur était encore un vivant sou­ve­nir, et la clas­sique férule de cuir jouait avec hon­neur son ter­rible rôle. » — Bal­zac, Louis Lam­bert, 1832.

« La plu­part de ces magis­trats me rap­pellent tou­jours le col­lège où les cor­rec­teurs ont une cabane auprès des com­mo­di­tés, et n’en sortent que pour don­ner le fouet. » — Cham­fortMaximes et pen­sées, 1795.

« Toutes ses pro­tes­ta­tions furent inutiles ; le prin­ci­pal fut inflexible, et fit mon­ter le cor­rec­teur. » — Jean-Bap­tiste-Joseph Cham­pa­gnac (1796-1858).

Au bagne était aus­si dit cor­rec­teur « l’homme, for­çat ou geô­lier admi­nis­trant le fouet ; terme admi­nis­tra­tif » — Esnault, Notes com­pl. dict. Dele­salle, 1947, cité par le TLF (voir aus­si Bob : dic­tion­naire d’argot).

Une phrase de Remy de Gour­mont (1858-1915) fait d’ailleurs le lien entre la cor­rec­tion lit­té­raire et le châtiment :

« Nous n’a­vons jamais de textes abso­lu­ment cor­rects, l’au­teur même ayant sou­vent été le plus négligent des cor­rec­teurs, ayant été son propre bour­reau, son propre saboteur. »

Dans l’histoire romaine, le cor­rec­teur était un « magis­trat adjoint aux consu­laires et aux pré­si­dents, pour concou­rir à l’administration des pro­vinces » (Larousse).

Dans l’histoire reli­gieuse, c’était un « supé­rieur [ou une supé­rieure] dans cer­tains ordres monas­tiques tels que les minimes » (ibid.). 

Tou­jours au couvent, j’ai trou­vé un sur­pre­nant couple lec­trice-cor­rec­trice, dans la règle de saint Augus­tin : 

extrait de la règle de saint Augustin
Extrait des « Regles de celle qui cor­rige les fautes qui se com­mettent en la lec­ture de table. », La Règle de saint Augus­tin, 1747.

« 1. La Cor­rec­trice des fautes qui se font par­mi la lec­ture de table, ins­trui­ra dou­ce­ment la Lec­trice qui seroit nou­vel­le­ment employée en cet exer­cice, ou qui autre­ment auroit besoin qu’on lui mon­trât la façon de s’en bien acquit­ter.
« 2. Lorsqu’en lisant par­mi le repas la Lec­trice aura fait quelque faute sur un mot ou syl­labe, le pro­non­çant mal, ou pren­nant l’un pour l’autre & ne se cor­ri­ge­ra sur le champ dira modes­te­ment, repe­tés, & en cas que la Lec­trice en le repe­tans ne le dit comme il faut, la Cor­rec­trice cor­ri­ge­ra tout haut le mot, où se trouve la faute.
« 3. Si nean­moins la Lec­trice se trou­bloit, ou se trou­voit confuse ou affli­gée, se voyant sou­vent & tout à coup reprise pour des fautes legeres, la Cor­rec­trice en pour­ra lais­ser une par­tie des moindres sans cor­rec­tion en public, & l’en aver­ti­ra après en par­ti­cu­lier cha­ri­ta­ble­ment, moyennent que ceci s’approuve par la Supé­rieure1. »

Avant les offi­ciers de la Cour des comptes, nous avions les correc­teurs des comptes. On pou­vait « ache­ter un office de cor­rec­teur en la chambre des comptes de Paris ».

Le bureau des cor­rec­teurs des comptes s’appelait la cor­rec­tion (por­ter un compte à la cor­rec­tion), de même que le bureau des cor­rec­teurs d’un jour­nal peut être appe­lé la cor­rec­tion (employer dans ce sens le mot cas­se­tin relève du jar­gon des cor­rec­teurs professionnels). 

Mais toute « action de cor­ri­ger, de chan­ger en mieux, de rame­ner à la règle » (Robert) est une cor­rec­tion. On ne cor­rige donc pas seule­ment les textes, mais aus­si les défauts, les vices, les abus, les mœurs, les habi­tudes, etc.

Les rema­nie­ments qu’apporte un auteur à son texte sont aus­si des cor­rec­tions

« Rien n’est plus propre à for­mer le goût que de démê­ler, dans les cor­rec­tions d’un grand écri­vain, le motif des arrêts qu’il a pro­non­cés contre lui-même. » — D’Alembert, Éloges, Des­préaux.

Je n’ai pas besoin de pré­sen­ter les mai­sons de cor­rec­tion, ni de pré­ci­ser ce que rece­voir, méri­ter, subir une cor­rec­tion peut signifier. 

La cor­rec­tion, c’est enfin, en lit­té­ra­ture et dans les beaux-arts, la « qua­li­té de ce qui est cor­rect, pure­té, absence de fautes ou d’écarts » : 

« […] cor­rec­tion gram­ma­ti­cale. cor­rec­tion du style. cor­rec­tion du des­sin. Les Anglais n’étaient pas encore par­ve­nus, du temps de Wal­ler, à écrire avec cor­rec­tion. (Volt.) Ce qui consti­tue une lettre bien écrite ne consiste pas seule­ment dans la cor­rec­tion du style. (Mon­crif.) La cor­rec­tion consiste dans l’observation scru­pu­leuse des règles de la gram­maire et des usages de la langue. (Beau­zée.) Il y a dans le style des qua­li­tés qui tiennent à la véri­té du sen­ti­ment, il y en a qui dépendent de la cor­rec­tion gram­ma­ti­cale. (Mme de Staël.) La cor­rec­tion semble de la pédan­te­te­rie [sic], et bien­tôt le style lit­té­raire aura besoin de com­men­ta­teurs. (Th. Gaut.) » — Larousse.

On devine qu’il faut reje­ter à la mer beau­coup de pois­sons quand on part à la pêche au cor­rec­teur.

NB — Les men­tions du Larousse font réfé­rence à Pierre Larousse, Grand dic­tion­naire uni­ver­sel du xixe siècle, 1866-1877.


On n’aide plus, on accompagne

Accom­pa­gner est un mot à la mode. Les ser­vices admi­nis­tra­tifs comme les cabi­nets-conseils ne vous aident plus dans votre vie per­son­nelle ou pro­fes­sion­nelle, ils vous accom­pagnent. Et cela tord par­fois la langue. On ren­contre des accom­pa­gner à + infinitif.

Copie d'écran d'une vidéo d'une thérapeute caennaise: «Pourquoi je peux t’accompagner à passer d’un statut de salarié à un statut d'indépendant à succès».
Image extraite d’une vidéo d’une thé­ra­peute caen­naise : « Pour­quoi je peux t’accompagner à pas­ser d’un sta­tut de sala­rié à un sta­tut d’in­dé­pen­dant à succès ».

Jusqu’alors, on accom­pa­gnait quelqu’un pour qu’il fasse quelque chose. Et si on l’accom­pa­gnait à, cela était sui­vi d’un nom de lieu (à la gare, à la mai­rie…).

La pré­po­si­tion sur étant aus­si deve­nue à la mode, désor­mais, on vous accom­pagne sur sur le choix de votre acti­vi­té, sur un sta­tut pro­fes­sion­nel, etc.

Accom­pa­gner quelqu’un, c’était l’escorter, lui ser­vir de guide. On l’accompagnait jusqu’à sa voi­ture comme… à sa der­nière demeure. Depuis une ving­taine d’années, on vous accom­pagne dans vos démarches.

 Fré­quence de accom­pagne dans vos dans le cor­pus de Gal­li­ca­gram.

Le verbe s’employait aus­si en soins pal­lia­tifs. Accom­pa­gner un malade, c’était « l’entourer, le sou­te­nir mora­le­ment et phy­si­que­ment à la fin de sa vie » (Robert).

Si nous avons tous tel­le­ment besoin d’être accom­pa­gnés, n’est-ce pas une preuve que le monde est bien malade ?

Comment enrichir son vocabulaire

« Com­ment enri­chir son voca­bu­laire » est une ques­tion qui revient pério­di­que­ment sur les réseaux sociaux, comme Quo­ra, géné­ra­le­ment avec deux adverbes : « rapi­de­ment » et « dura­ble­ment ».

La réponse évi­dente, c’est lire. C’est en effet en côtoyant les mots qu’on les acquiert. L’avantage de la lec­ture par rap­port au son (radio, pod­casts) ou à l’image (télé­vi­sion, You­Tube), c’est de les voir écrits, et donc d’acquérir en même temps leur ortho­graphe. Sans comp­ter, bien sûr, les autres avan­tages de la lecture ! 

Mais com­ment peut-on accé­lé­rer cette acqui­si­tion ? Il existe pour cela un cer­tain nombre de livres. 

J’en ai sélec­tion­né quatre (par­mi ceux des­ti­nés aux adultes fran­co­phones), plus ou moins aus­tères, clas­sés du plus récent au plus ancien (liens vers les fiches des éditeurs). 

Je ne les ai pas étu­diés per­son­nel­le­ment. Cha­cun pour­ra choi­sir, d’après les fiches, celui qui semble lui conve­nir le mieux. 

Pour que l’acquisition de mots nou­veaux soit durable, il faut les uti­li­ser. Les pla­cer rapi­de­ment dans la conver­sa­tion ou dans un texte après les avoir appris, puis les main­te­nir vivants, actifs, au fil du temps. C’est ce qu’on appelle la réac­ti­va­tion ou la conso­li­da­tion, essen­tielle dans tout apprentissage.

Il s’agit là d’acquérir un voca­bu­laire riche, pré­cis et utile. Je n’ai donc pas rete­nu d’ouvrages sur les mots « rares et char­mants », qui ne manquent pas, comme Cra­pous­sin et Nigue­douille. La belle his­toire des mots endor­mis.

☞ Voir aus­si La biblio­thèque du cor­rec­teur.

Du décorum qu’on garde à celui qu’on regarde

"Le Sacre de Napoléon", de Jacques-Louis David, 1805-1807
Le sacre de Napo­léon (ici, peint par J.-L. David, 1805-1807), déco­rum ou bar­num impérial ?

Une phrase dans un récent entre­tien avec Tho­mas Jol­ly1 dans Le Monde a réveillé une réflexion qui traî­nait dans un coin de ma tête. Le met­teur en scène racon­tait un sou­ve­nir d’en­fance, à l’âge de six ans : 

« Je lui explique [à sa prof de danse] que ce que nous fai­sons n’est pas assez beau, que l’endroit est moche. Moi, je vou­lais des tutus cha­toyants, des dorures, un déco­rum fas­tueux, je vou­lais déjà mon­ter Le Lac des cygnes, même si, à cette époque, je ne le connais­sais pas ! »

Le mot déco­rum a, en effet, connu une évo­lu­tion intéressante. 

Le déco­rum (avec un article défi­ni), c’est d’abord (1587) quelque chose qu’on res­pecte, qu’on observe, qu’on « garde » (en fran­çais du xviie s., voir Fure­tière) : l’ensemble des règles de bienséance.

C’est aus­si, plus spé­cia­le­ment, à par­tir de 1889, l’ap­pa­rat offi­ciel, autre­ment appe­lé « éti­quette, pro­to­cole ou céré­mo­nial », tel celui qu’a mis en scène pour sa propre gloire Napo­léon Ier.

Mais, entre-temps, nous dit Alain Rey2, « il a déve­lop­pé, pro­ba­ble­ment sous l’influence du groupe de décor, déco­rer, le sens de “ce qui orne, pare” (1835). Il prend alors la valeur péjo­ra­tive de “luxe ostentatoire”. »

La date don­née par Alain Rey cor­res­pond au Père Goriot de Bal­zac, cité par le TLF :  « Nous avons une cui­si­nière et un domes­tique, il faut gar­der le déco­rum, papa est baron. »

Il s’agit tou­jours de « ce qui convient », mais en matière de signes exté­rieurs d’appartenance à une classe : employer des domes­tiques, por­ter cer­tains vête­ments3 comme habi­ter un lieu « qui en jette ». Habi­tude bien fran­çaise, à en croire un élève de David, Étienne-Jean Delé­cluze : « On retrouve par­tout ces habi­tudes de faire tout avec appa­rat, ce besoin de jeter de la poudre aux yeux, que l’on déguise sous le nom de bien­séance, de décence, de déco­rum » (Jour­nal, 1827, cité par le TLF).

Le déco­rum, comme l’apparat (du latin appa­ra­tus « pré­pa­ra­tifs »), c’est un tout. On com­prend aisé­ment que le « déco­rum royal », notam­ment, regroupe un ensemble de signes, y com­pris une déco­ra­tion fas­tueuse. — D’ailleurs, l’éti­quette, de son côté, désigne à la fois le céré­mo­nial, « ce qui marque quel­qu’un et le classe » et… le prix des choses ! 

Un décor qui impressionne

Concer­nant le décor seule­ment, il faut noter que déco­rum a dési­gné son aspect fas­tueux (le déco­rum d’un hall d’entrée) avant de dési­gner le décor lui-même (Il y avait des plantes vertes, des tapis rouges, un buf­fet somp­tueux, tout un déco­rum). 

Pour Larousse, dont je tire les deux exemples pré­ci­tés, c’est un « emploi cou­rant mais impropre ». Le dic­tion­naire recom­mande de « n’u­ti­li­ser le mot qu’au sens de “bien­séance, éti­quette” ». Anti­dote se can­tonne encore à ce der­nier sens. 

Dans sa der­nière édi­tion, l’Aca­dé­mie, elle, admet une exten­sion de sens, qu’elle ne dis­cute pas : « A sou­vent le sens d’Appa­rat. S’entourer d’un grand déco­rum. Il a le goût du déco­rum. »

À la dif­fé­rence du petit, le Grand Robert enre­gistre, lui, le sens péjo­ra­tif de « décor très soi­gné, pom­peux », avec une cita­tion du Hus­sard sur le toit, de Gio­no (1951) : « Ils contour­naient une suc­ces­sion de petites col­lines toutes plus gen­tilles les unes que les autres. Chaque détour les emme­nait dans des pers­pec­tives où il n’é­tait ques­tion que de pins espa­cés autour de bos­quets ruti­lants en un déco­rum que le pre­mier venu aurait trou­vé royal. » 

Pas­sons sur le pléo­nasme « déco­rum faste » de Tho­mas Jol­ly, forme d’insistance assez cou­rante à l’oral. Par contre, on ne peut trop défi­nir si son déco­rum résume « des tutus cha­toyants, des dorures » (le clin­quant) ou leur ajoute un décor grandiose. 

En effet, dans la presse et la com­mu­ni­ca­tion d’au­jourd’­hui, quand le décor impres­sionne, il devient aisé­ment déco­rum. Le mot est en vogue – tout pour bar­num, d’ailleurs, au sens de « tapage ». Cela tient à la ten­dance à employer des « grands mots ». Et quoi de mieux qu’un mot son­nant latin ? 

Évolution des graphies "decorum" et "décorum" dans Ngram Viewer
Évo­lu­tion des gra­phies deco­rum et déco­rum dans Ngram Vie­wer. Si la seconde prend son essor vers 1820, sa pro­gres­sion est très nette depuis la fin des années 1970.

Voir le titre de cette expo­si­tion pari­sienne de 2014 : « Deco­rum - Tapis et tapis­se­ries d’ar­tistes ». Aus­si belles soient-elles, ces œuvres ne consti­tuent pas pro­pre­ment un déco­rum – et le texte de pré­sen­ta­tion ne four­nit pas de jus­ti­fi­ca­tion de ce terme. 

Voir aus­si cet exemple tiré de Libé­ra­tion, par­mi d’autres réper­to­riés dans le DVLF, dic­tion­naire par­ti­ci­pa­tif : « Ce déco­rum repro­duit l’am­biance sonore d’une salle de ciné­ma THX, quand les tri­cé­ra­tops de Juras­sic Park déboulent dans le dos du spectateur. »

Le déco­rum ne devrait pas (n’au­rait pas dû) perdre son sens d’o­ri­gine pour prendre celui, plus com­mun, de « décor », encore moins celui de « déco­ra­tion », contre lequel nous pré­vient, bien soli­tai­re­ment, le dic­tion­naire Cor­dial : « Ne pas employer ce mot au sens de “déco­ra­tion”. […] Ne dites pas “ce vase a été pla­cé là pour le décorum”. »

Le ver était dans le fruit chez Lit­tré, avec sa défi­ni­tion étran­ge­ment suc­cincte et ambi­guë, cal­quée sur l’é­ty­mo­lo­gie latine : « Ce qui convient et décore. » Et, à en croire une remarque dans le sup­plé­ment de son dic­tion­naire, cette déri­va­tion ger­mait depuis plus long­temps encore : 

« REM. Le Pous­sin a employé ce mot dans le sens de déco­ra­tion.
“Puis viennent l’or­ne­ment, le déco­rum, la beau­té, la grâce, la viva­ci­té, le cos­tume, la vrai­sem­blance et le juge­ment par­tout,” Lett. du Pous­sin, 7 mars 1665, dans J. Dumes­nil, Hist. des amat. ital. p. 542. »

Exemple ancien, rare, trou­vé dans une lettre du maître, qui n’ex­plique pas à lui seul l’ac­cep­tion actuelle que gri­gnote aujourd’­hui le mot déco­rum. Les locu­teurs et les scrip­teurs ont le droit d’être en avance sur les dic­tion­naires, mais ils prennent le risque d’être mal com­pris, et les en aver­tir est une des mis­sions du correcteur.


“Une espace”, vraiment ?

« Le logi­ciel Word affiche : “espaces non com­pris”. Espace est un mot fémi­nin, c’est le comble pour un cor­rec­teur ortho­gra­phique. » C’est, en sub­stance, ce que je lis dans les publi­ca­tions en ligne de nombre de confrères.

Fenêtre des sta­tis­tiques d’un docu­ment Word, qui en affiche les « carac­tères (espaces compris) ».

Certes, espace est bien, tra­di­tion­nel­le­ment, un sub­stan­tif fémi­nin en typo­gra­phie, mais Word est un logi­ciel tous publics, pas un outil réser­vé aux spé­cia­listes. Je com­prends que Micro­soft ait choi­si le genre le plus courant. 

Voir ce qu’en dit Anti­dote : 

En typo­gra­phie, le mot espace est géné­ra­le­ment fémi­nin, par­ti­cu­liè­re­ment quand il désigne la lamelle qu’on inter­ca­lait entre les carac­tères de plomb, de façon que les mots à impri­mer soient sépa­rés les uns des autres. Il y avait plu­sieurs varié­tés d’espaces, selon leur chasse (lar­geur) : espace fine, espace forte, espace moyenne, etc. De plus, par méto­ny­mie, les typo­graphes emploient sou­vent espace au fémi­nin pour dési­gner le blanc obte­nu entre les mots impri­més sur le papier, même si les tech­niques modernes d’impression ne font plus appel aux lamelles, mais à des carac­tères numé­riques, pour les­quels on a repris cer­taines anciennes appel­la­tions, comme espace fine. Cela dit, dans le lan­gage cou­rant, il n’est pas incor­rect de don­ner le genre mas­cu­lin à espace dans le sens géné­ral d’« inter­valle entre deux mots », puisqu’un des sens géné­riques du mot mas­cu­lin un espace est celui d’« inter­valle entre deux objets ».

De même, on trouve dans Le Grand Robert , à l’en­trée espace n. m., cette phrase : « L’es­pace entre deux mots est pro­duit par une espace. »

Dans le dic­tion­naire de l’A­ca­dé­mie : « En écri­vant, il faut ména­ger entre les mots un espace suffisant. »

Sa 8e édi­tion (1935) pré­ci­sait encore : « En termes de Typo­gra­phie, il désigne des Petites pièces de fonte, plus basses que la lettre, qui ne marquent point sur le papier, et qui servent à sépa­rer les mots l’un de l’autre. Dans ce sens il est fémi­nin. »

Enfin, dans le TLFI, on peut lire cette cita­tion : « Les carac­tères [des Contes de Per­rault] sont ceux du xviie siècle […] il y a de l’es­pace et un espace égal entre les mots, l’air y cir­cule à tra­vers avec une sorte d’ai­sance » (Sainte-Beuve, Nouv. lun­dis, t. 1, 1863-69, p. 297).

À l’ère de la publi­ca­tion entiè­re­ment infor­ma­ti­sée, l’at­ta­che­ment au genre fémi­nin pour espace est un choix dis­cu­table. L’u­sage tranchera. 

PS – Dans un docu­ment de 1965, dif­fu­sé dans un tweet par le syn­di­cat Cor­rec­teurs CGT, je lis : « Le même espace tu met­tras / Entre les mots exac­te­ment. » Tiens, donc ! D’a­près une cou­pure de presse publiée par le blog Biblio­Mag, ce texte remon­te­rait au milieu du xixe siècle, tou­jours avec « le même espace ». Voi­là qui confirme les sources pré­cé­dentes : même en typo­gra­phie, le mot espace n’est fémi­nin que lors­qu’il désigne le carac­tère. L’es­pace (le blanc) entre les mots reste masculin.

Les Commandements du typographe, 1965, où on lit "le même espace".
Les Com­man­de­ments du typo­graphe, 1965.

“Opter” employé sans complément

Sur­pris de ren­con­trer le verbe opter employé sans com­plé­ment (intro­duit par pour ou entre) dans un texte juridique :

Si l’en­tre­pre­neur sou­haite pas­ser au régime réel, il doit opter dans le délai du dépôt de sa déclaration […]

En optant, l’en­tre­pre­neur pour­ra se ver­ser un salaire […]

j’ai trou­vé qu’en droit il a le sens de « choi­sir entre plu­sieurs situa­tions juri­diques pré­vues à un contrat » (Grand dic­tion­naire ter­mi­no­lo­gique).

Dans d’autres contextes, cet emploi est rare mais attesté :

Il a été ordon­né qu’il opte­rait dans les six mois. Vou­lez-vous être pour nous ou contre nous ? optez, il faut opter, il faut néces­sai­re­ment opter (Dic­tion­naire de l’A­ca­dé­mie fran­çaise, 7e éd., 1878).

Il était tou­jours prêt à tout […], aus­si indif­fé­rent à ceci qu’à cela, sans que jamais sa volon­té se don­nât la peine ou eût la force d’opter, de dési­rer, de vou­loir (Gon­court, Sœur Phi­lom., 1861, p. 274 — Tré­sor de la langue fran­çaise).

Le repos et la liber­té me paraissent incom­pa­tibles : il faut opter (Rous­seau, Gouv. de Pologne, 1 — Lit­tré).

Le peuple n’a guère d’es­prit, et les grands n’ont point d’âme : […] Faut-il opter ? Je ne balance pas, je veux être peuple (La Bruyère).

[…] il faut opter, mon petit cava­lier. Voyez donc si, vous en tenant à l’É­glise, vous vou­lez pos­sé­der de grands biens et ne rien faire ; ou, avec une petite légi­time, vous faire cas­ser bras et jambes, pour […] par­ve­nir sur la fin de vos jours, à la digni­té de maré­chal de camp avec un œil de verre, et une jambe de bois ? (Antoine Hamil­ton, Mémoires du comte de Gra­mont, III) — Deux exemples tirés du Grand Robert.

En his­toire, cela prend même un sens pré­cis : déci­der de quit­ter les ter­ri­toires annexés par l’Al­le­magne à l’is­sue de la guerre fran­co-alle­mande de 1870 afin de conser­ver la natio­na­li­té française.

Mais oui, quatre ans après la guerre, chez ma grand’­mère, où ma mère était venue accou­cher, tan­dis que mon père, qui avait opté, res­tait en France… (Paul Acker, Les Exi­lés, Plon, 1911) — Wik­tion­naire.