Quatrième écrivain1 invité par les Éditions Le Robert à partager ses « Secrets d’écriture », l’auteur de thrillers Franck Thilliez évoque dans son livre, Le Plaisir de la peur, l’étape de la correction. Après avoir expliqué comment il peaufine son propre travail stylistique, puis comment il répond aux remarques de l’éditeur, en deux temps, d’abord « liées au rythme et à la dynamique du récit », puis concernant « les petites incohérences », il aborde le moment où « le texte part dans le circuit de correction ».
L’écrivain exalte alors « une mécanique de précision », au « microscope », avec « une approche sensible des textes » mais « sans se laisser porter » par eux. Il reproduit deux pages Word de ses romans, annotées à la main par « la préparatrice ». Elles montrent des corrections lexicales (boîte à aux lettres, elle glissa enfonça la clé dans la serrure…), grammaticales (notamment, l’ajout d’une préposition : la personne qui avait souscrit [à] ce service), mais aussi stylistiques (dont elle […] régla les dix euros de [réclamés pour la] clé). Un commentaire dans la marge demande, de plus, si l’on peut parler de « gelées matinales » en avril, moment où, d’après la logique du récit, se situe l’action.
Cependant, « quoi qu’on fasse », l’espoir du zéro faute est toujours déçu, ce que l’auteur excuse volontiers : « Certains lecteurs crient au scandale lorsqu’ils détectent sept coquilles sur l’ensemble d’un gros roman. […] Mais sept coquilles sur 700 000 signes, cela donne 0,001 % d’erreur. Nul n’est parfait […] »
Pour finir, il souligne « le travail remarquable des personnes chargées de rendre nos textes les [sic] plus harmonieux possible ».
Ces personnes talentueuses […] ne se contentent pas de traquer les fautes. Elles sont à la fois des chirurgiennes de la langue française, mais aussi des musiciennes capables de repérer l’usage trop systématique d’un mot, d’une expression et d’apporter des propositions. Si j’écris « un astronaute » alors que je parle d’un Russe, elles me diront que le terme exact est cosmonaute. Si l’un de mes personnages joue au Rubik’s Cube alors que mon histoire se passe en 1973, elles me diront que c’est impossible car le fameux casse-tête a été inventé en 1974. Ces personnes sont capables d’appréhender un récit sous des angles différents, en s’intéressant à la structure des phrases, à la cohérence globale, locale, aux déplacements, au temps. Sans elles, les lecteurs affronteraient nombre de minuscules éléments perturbateurs qui les empêcheraient de profiter à 100 % du voyage. Ce serait dommage.
Un sympathique hommage qui n’est pas sans me rappeler celui de l’écrivain québécois Nicolas Dickner en 2017 : « Les réviseuses » (podcast (aparté), Alto).
On note avec plaisir que la nom de la correctrice du présent livre est mentionné dans le colophon.
Franck Thilliez, Le Plaisir de la peur, Le Robert et Fleuve éditions, 2022, 167 pages.