Je viens de récupérer le « Jouette1 » des correcteurs du xviiie siècle. Pour eux, c’était le « Restaut ».
Ce nom désigne la quatrième édition (1752), revue et considérablement augmentée par Pierre Restaut2, du Traité de l’orthographe française en forme de dictionnaire, connu sous le nom de Dictionnaire de Poitiers, publié pour la première fois en 1739 par Charles Leroy de La Corbinaye (parfois appelé Leroy ou Le Roy, 1690-1739), lexicographe et prote d’imprimerie dans cette ville3. Le PDF que j’ai trouvé est celui d’une réédition de 1765 (à Poitiers, chez Jean-Félix Faucon, comme toutes les éditions, sauf celle de 1792, chez François Barbier (même ville), et les nombreuses contrefaçons françaises et étrangères). Une édition revue par Laurent-Étienne Rondet paraîtra en 1775.
« Il ne s’agit pas du premier livre consacré au sujet, mais l’auteur se montre innovant en créant un outil “portatif”, c’est-à-dire ramassé en un seul volume et présenté dans un format maniable et facile à consulter. » — Le Dicopathe.
La notoriété du réviseur de 1752 a pris le pas sur l’identité de l’auteur originel, mort peu avant la sortie de son livre.
« Né à Beauvais, Pierre Restaut (1696-1764) est le fils d’un marchand de draps. Il fut d’abord chargé de leçons particulières au collège de Louis-le-Grand, puis se fit recevoir avocat au parlement. Distingué par d’Aguesseau, il est pourvu d’une charge d’avocat au conseil du roi en 1740.
« C’est l’ouvrage Principes généraux et raisonnés de la Grammaire française (1730) qui fit sa réputation : ce fut le premier manuel élémentaire composé pour l’étude du français. Adopté par l’Université de Paris et pour l’éducation des enfants de France, il est abrégé par l’auteur lui-même (1732), puis augmenté d’un traité de versification, et connait neuf éditions du vivant de l’auteur, la dernière datant de 1819. » — Wikipédia.
« Plus tard, les abrégés de Wailly, de Gattel, de Catineau, de Marguery, firent oublier ceux de Restaut », selon La Presse du 26 octobre 1846.
Dans son Traité élémentaire de l’imprimerie (1793), Antoine-François Momoro écrit :
« Il est […] indispensable pour un compositeur français de savoir bien sa langue : pour cela il doit en étudier les principes dans la Grammaire de Wailly ou de Restaut, se procurer le Traité de l’orthographe de ce dernier, qui est généralement le plus suivi.
« Il est bien des auteurs qui veulent que l’on suive, dans l’impression de leurs ouvrages, l’ort[h]ographe de l’académie ; mais elle diffère peu de celle de Res[t]aut ; aux accens graves près, et à quelques lettres doubles supprimées, c’est la même. »
Des broutilles…
Pour plus d’information sur cet ouvrage, lire l’excellent article du Dicopathe, dans lequel j’ai puisé quelques détails pour mon propre texte.
- Voir Le “TOP”, référence ancienne du métier du correcteur.
- Voir « Restaut », dans Ferdinand Buisson, Nouveau Dictionnaire de pédagogie et d’instruction primaire, 1911, édition numérique, Institut français de l’éducation.
- Voir « RESTAUT (Pierre) », dans Pierre Larousse, Grand Dictionnaire universel du xixe siècle, t. 13, 1875, Wikisource.