Du problème des tirets dans les dialogues

Il arrive que l’u­sage sys­té­ma­tique et sans dis­cer­ne­ment des tirets dans les dia­logues rende la lec­ture dif­fi­cile, la limite entre dia­logue et récit n’é­tant pas mar­quée par un guille­met fermant.

Dans son Dic­tion­naire ortho­ty­po­gra­phique moderne (s. v. dia­logues), Jean-Pierre Coli­gnon prend clai­re­ment par­ti pour le main­tien des guille­mets comme déli­mi­ta­teurs de parole.

Dans la typo­gra­phie tra­di­tion­nelle, tous les dia­logues com­mencent et finissent par un guille­met. C’est tou­jours la meilleure façon de pro­cé­der, celle qui déjoue tout risque de mécompte.

Beau­coup d’é­cri­vains, d’é­di­teurs, d’im­pri­meurs se bornent à pla­cer un tiret devant chaque amorce ou reprise de dia­logue, chaque fois qu’un per­son­nage prend la parole. Hélas ! ce pro­cé­dé – en faveur grâce à la faci­li­té de son emploi – rend confus la plu­part des textes. Et cela devient très pénible quand un inter­lo­cu­teur dévide une tirade de plu­sieurs ali­néas. Paroles, jeux de scène, des­crip­tions de lieux, com­men­taires du nar­ra­teur ou de l’au­teur, tout cela est mélan­gé sans dis­tinc­tion. Aus­si, et non par dilec­tion pour l’ar­chaïsme ou la mode « rétro », ne peut-on que recom­man­der la pré­sen­ta­tion clas­sique, qui exclut toute obs­cu­ri­té.

Coli­gnon donne un exemple (je mets les guille­mets en gras) :

« Votre posi­tion ain­si que la fonc­tion qui est la vôtre vous donnent droit à une arme. C’est le règle­ment, cela fait par­tie de vos émo­lu­ments. Il faut que vous en ayez une. J’es­père que je suis clair… 
– Tout à fait, mais quelque chose m’é­chappe. » D’é­ner­ve­ment, j’a­vais rou­gi jus­qu’aux oreilles. « Je n’ai jamais vu la cou­leur du pis­to­let dont tu me parles, tu com­prends ? 
– Je com­prends. Mais peu importe que vous l’ayez vu ou pas. Il est for­cé­ment en votre pos­ses­sion ! »
(D’a­près Lao Ma, Tout ça va chan­ger, éd. Phi­lippe Picquier.)

Je par­tage l’a­vis du grand chef.