
En matière d’orthotypographie1 (les règles de composition des textes), les correcteurs français citent toujours les mêmes sources : l’Imprimerie nationale, Louis Guéry, Charles Gouriou2, les deux Jean-Pierre (Lacroux et Colignon), Aurel Ramat, plus rarement Yves Perrousseaux et Annick Valade. Le Code typographique3 (18 éditions entre 1928 et 1997), mis au jour par la profession et qui fut longtemps l’ouvrage le plus utilisé, semble avoir perdu de sa réputation. (On peut retrouver ces références dans mon article « Qui crée les codes typographiques ? ».)
Mais voici cinq autres manuels, moins connus, que j’ai acquis récemment, après avoir fouillé les bibliographies et les sites de vente de livres d’occasion.
Jean-Pierre CLÉMENT, Dictionnaire typographique ou Petit guide du tapeur à l’usage de ceux qui tapent, saisissent ou composent textes, thèses ou mémoires à l’aide d’un micro-ordinateur, Paris, Ellipses, 2005, 255 p.
L’auteur (né en 1945), hispaniste, était alors professeur à l’université qui s’appelait encore Paris-Sorbonne. Comme Perrousseaux, il diffuse des conseils aux utilisateurs de logiciels de traitement de texte, « tout spécialement aux étudiants qui rédigent thèses et mémoires ». Particularité : les règles sont illustrées de phrases tirées de la littérature.
Éric MARTINI, Petit guide de typographie, Paris, Glyphe & Biotem éditions, 2002, 70 p.
L’auteur est directeur de l’agence de communication Glyphe. ll s’agit de recommandations minimales aux auteurs.
Serge ASLANOFF, Manuel typographique du russiste, Paris, Institut d’études slaves, 1986, 255 p.
La curiosité m’a poussé à me procurer cette référence, l’auteur étant parfois mentionné par les passionnés de typographie. C’est un ouvrage dense et austère. Il s’adresse, bien sûr, à « tout auteur qui écrit en français sur un sujet relatif au domaine russe […]. La première partie […] énumère les procédés graphiques qui s’offrent […] à tous ceux qui, dans leur profession, ont à décrire des choses russes. La deuxième partie traite en détail de l’emploi des majuscules et des pratiques — qui sont souvent opposées — issues d’une part des traditions orthographiques russes et des normes typographiques soviétiques, et d’autre part des ouvrages francophones qui abordent ce problème complexe. »
Code typographique, [Condé-sur-Noireau], Corlet, imprimeur, S.A., s. d., 164 p. Avec une introduction de Jean Duval.
Celui-ci est une vraie trouvaille. Il n’est pas référencé par la BnF et très rarement mentionné dans les bibliographies. Duval, correcteur chez Corlet, l’adresse aux clients et collaborateurs de l’imprimerie. Le texte reprend, sans le préciser, sinon par son titre intérieur, une vieille édition du Lexique des règles typographiques de l’Imprimerie nationale.
N.B. — C’est chez Charles Corlet qu’ont été imprimés le manuel d’Aslanoff et certaines des premières éditions du Ramat typographique.
Georges MORELL, Autour des mots. Le plus court chemin entre la typographie et vous, Paris, Les éditions des Journaux officiels, 2005, 579 p.
L’auteur est décrit dans une des préfaces comme « typographe de formation ». Huit correcteurs sont mentionnés parmi les nombreux collaborateurs de cet ouvrage.
Les règles typographiques y occupent 50 pages. On trouve dans ce gros volume quantité d’autres informations comme « les termes étrangers avec leur équivalence française, la féminisation des noms de métiers et une grande liste de mots présentant des difficultés orthographiques ou d’interprétation ». La dernière partie résume l’histoire de l’imprimerie, de l’écriture, des chiffres, de la ponctuation et du papier.
C’est une « édition revue et considérablement augmentée » d’un Aide-mémoire orthographique et typographique établi en interne en 1982.
Notez que, même si je possède désormais une jolie collection de manuels typographiques, je reste un « petit joueur » : l’impressionnante somme bibliographique de Jean Méron (1948-2022), Orthotypographie (PDF, à ne pas confondre avec l’œuvre de Lacroux), recense 2 500 ouvrages depuis le xvie siècle — mais qui vont bien au-delà du champ des règles de composition. Voilà qui incite à la modestie !
- Voir mon article « Orthotypographie, un terme mal défini ». ↩︎
- Voir « Charles Gouriou, un (autre) correcteur-auteur discret ». ↩︎
- Voir « De quand date le premier “Code typographique” ? ». ↩︎