L’humour de Jean-Pierre Lacroux

Je n’a­vais jamais lu l’a­vant-pro­pos du grand œuvre de Jean-Pierre Lacroux, Ortho­ty­po­gra­phie – on saute sou­vent ces intro­duc­tions, on a tort. Il est déli­cieu­se­ment écrit et par­se­mé d’un humour dis­cret mais effi­cace. Extrait :

La plu­part des récri­veurs, des cor­rec­teurs et des typo­graphes ne sont ni plus para­noïaques ni plus obtus que la plu­part des lin­guistes ; ils ne sont pas spé­cia­le­ment puristes, encore moins fixistes ou « nor­mo­lâtres » : ils savent, eux aus­si, que notre langue est vivante, qu’elle bouge encore, l’aïeule désin­volte, et se régé­nère ; qu’elle évo­lue, danse sur ses marges, gra­cieuse ou déso­lante ; qu’il est absurde de vou­loir la pétri­fier en l’état, de lui inter­dire des emprunts judi­cieux, des fan­tai­sies pas­sa­gères ou durables. Une carac­té­ris­tique pour­tant leur est propre : on leur demande de faire comme si de rien n’était, on les paye pour faire res­pec­ter la norme écrite. Faut-il s’étonner s’ils aiment qu’elle soit pério­di­que­ment précisée ?