« [Le correcteur] doit éviter avec le plus grand soin le vice de l’ivrognerie, de peur de ne plus rien voir du tout, ou, au contraire, de voir plus qu’il n’y a en réalité. Quand un ivrogne essaie de prendre une chandelle pour s’éclairer, sa vue défaille et il trébuche. Donc, un homme qui est chargé de cette mission et qui boit volontiers, boit sans avantage et pour un dommage qui atteint beaucoup d’autres. Cet homme inutile1 est un bon à rien et si le maître ou le recteur d’atelier typographique le voyait souvent dans cet état, il ne serait pas étonnant qu’il lui dise : « Dehors, scélérat. » Que celui qui est lié à cette charge s’acquitte donc de son travail avec sobriété, pas à travers un écran de vapeurs exhalées par excès de boissons. »
Correcteur, te voilà prévenu : boire ou relire, il faut choisir2 !
Jérôme Hornschuch, Orthotypographia, 1608. Trad. du latin par Susan Baddeley, éd. des Cendres, 1997, p. 63-64.
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Article modifié le 30 septembre 2023.
- Dans cette édition, l’italique indique les mots grecs employés par l’auteur dans son texte en latin.
- « Dans ses Conseils aux jeunes écrivains, André Gide faisait remarquer : « Écris, si tu veux, dans l’ivresse ; mais quand tu te relis, sois à jeun… » Eh bien, l’on pourrait dire que le correcteur, dans son rapport à l’écriture, a fait vœu d’abstinence : il se doit d’être toujours à jeun. » — Sophie Aouillé, « Tenir la lettre », Essaim, 2001/1 (no 7), p. 146, DOI 10.3917/ess.007.0145.