Pourquoi ? Parce que ! (et non “car”)

Un pas­sage d’un article de Libé­ra­tion, daté d’hier, me donne l’oc­ca­sion d’un point de grammaire.

Alors pour­quoi main­te­nant ? Pour­quoi ici ? Est-ce car le Nou­veau Front popu­laire y orga­ni­sait un apé­ro quelques heures plus tôt ? Est-ce car les artistes du soir ont réuni un public jeune et mar­qué à gauche ? »

Il s’agit là d’une construc­tion abu­sive (Gre­visse et Goosse, § 1090), mais de plus en plus fréquente.

La Vitrine lin­guis­tique explique : 

La plu­part du temps, car et parce que ne sont pas inter­chan­geables. En effet, car a géné­ra­le­ment une valeur plus sub­jec­tive que parce que : elle per­met d’énoncer une jus­ti­fi­ca­tion plu­tôt qu’une cause logique ou réelle.

Suzy est cer­tai­ne­ment bien rému­né­rée, car elle vient de s’acheter une mai­son et une voi­ture neuve. […]

Pierre a sur­vé­cu à l’incendie parce qu’il est sor­ti à temps de l’édifice. […]

Dans le pre­mier exemple, il ne peut s’agir que d’une jus­ti­fi­ca­tion, d’où l’emploi de car ; en effet, le fait de s’acheter une mai­son et une voi­ture neuve n’est pas la cause d’une bonne rému­né­ra­tion, mais bien sa consé­quence. Dans le deuxième exemple, parce que intro­duit bien la cause réelle.

Autre exemple, don­né par Hanse et Blam­pain (car) :

On dis­tingue : Le chat miaule parce qu’il a faim (cause) et Le chat a faim, car il miaule (on dit pour­quoi on est auto­ri­sé à décla­rer que le chat a faim ; on donne la preuve de ce qui est énon­cé, on n’exprime évi­dem­ment pas la cause : Le chat a faim).

Sur cette ques­tion, on peut lire aus­si le long article du blog Par­ler fran­çais.

NB — L’hé­si­ta­tion entre car et parce que n’est par nou­velle : Robert Le Bidois trai­tait déjà de cette ques­tion dans Le Monde en 1966.

Tou­jours dans la Vitrine lin­guis­tique, voir aus­si la dif­fé­rence entre parce que et puisque.

Les réfé­rences des ouvrages de Gre­visse et Goosse et de Hanse et Blam­pain sont don­nées dans La biblio­thèque du cor­rec­teur.