Je relève dans Les Annales politiques et littéraires, du 22 avril 1894, sous la plume de Francisque Sarcey (critique littéraire célèbre), les lignes suivantes :
« Je supplie le correcteur de ne pas me mettre : Tout vient à point à qui sait attendre. »
Noter la préposition à en italique.
S’agit-il d’une note à l’intention du correcteur qui s’est retrouvée — par mégarde ou par choix du correcteur — dans la composition, ou l’auteur a-t-il vraiment souhaité qu’elles soient imprimées ? Le mystère demeurera.
Mais cette insistance demande une explication. On la trouve dans le Wiktionnaire (d’après Delboulle A., XIII. Tout vient à point qui sait attendre, in Romania, t. 13, no 50-51, 1884, p. 425-426) :
« On disait au xvie siècle “tout vient à point qui sait attendre”, qui signifiait “tout vient à point si l’on sait attendre”. On disait aussi, dans un sens comparable, “tout vient à point qui peut attendre”.
« L’emploi de qui dans le sens de “si on”, “si l’on”, fréquent chez Montaigne notamment, a progressivement disparu et la locution n’a plus été comprise qu’au prix de l’insertion de la préposition à, entraînant une légère modification du sens (“c’est à celui qui sait attendre qu’échoit le moment venu ce qu’il espérait”). »
L’auteur s’explique
Dans une lettre à Paul Risch, transmise par celui-ci à Sergines [pseudonyme d’Adolphe Brisson] et publiée dans Les Annales politiques et littéraires, le 31 mai 1903, Francisque Sarcey confirme cette explication :
« 26 juin 1898.
« Mon cher ami,
« J’écris toujours : “Tout vient à point qui sait attendre.” Mais les correcteurs ne veulent pas. Ils sont nos maîtres.
« Qui, en ce sens, est une vieille formule française équivalant au si quis des latins.
« Tu en trouveras deux ou trois exemples au mot qui dans Littré.
« Cette accentuation ne s’est conservée que dans les locutions proverbiales.
« Tout vient à point nommé, si l’on sait attendre… (si quis ou qui).
« Mes grandes amitiés.
« Tout à toi,
Francisque. »